Il y a peu, l'AEGE a mis en ligne une intéressante cartographie "
des métiers de l'intelligence économique" (
https://tinyurl.com/tzaup2s). Cette cartographie est d'autant plus importante que le dernier exercice du genre a une dizaine d'années.
En première analyse, ce qui impressionne, c'est le nombre et la variété des métiers répertoriés. A lire entre les lignes des quelques mots de présentation de ce travail, il semble que le contenu de cette cartographie repose principalement sur les rôles, métiers et pratiques des anciens étudiants de l'école. Et il faut bien convenir que le nombre de portes qui sont ouvertes par ce cursus est bien impressionnant.
En deuxième analyse, par contre, on ne peut qu'être surpris par une certaine malléabilité du concept de métier et d'intelligence économique. Juste à titre d'exemple, pour deux "métiers" que je pratique, si le mind mapping (TIC) mérite assurément sa place dans la boite à outils des praticiens de l'intelligence économique, il me semble pour le moins aventureux de le considérer comme un métier. A l'opposé, la certification (Audit/Conseil), qui me semble davantage une action qu'un métier, me semble surtout relever d'activités de soutien aux démarches d'IE.
Tout ceci pour dire fustiger, une fois encore, cette tendance à vouloir faire de l'intelligence économique le grenouille de la fable. J'ai pratiqué pratiqué l'intelligence stratégique avec un kiné. Cela n'en fait pas un métier de l'IE. Et je pense vraiment que les (vrais) acteurs de l'intelligence économique devraient avoir la modestie et la simplicité de reconnaître le périmètre limité de leurs domaines d'excellence et de pratiques et que pour le reste, ils font appels à des professionnels d'autres domaines d'activités.
Le praticien en IE a bien pour tâche d'éveiller les dirigeants d'entreprises aux besoins en matière de protection des systèmes d'informations, et d'établir avec ces derniers des objectifs, stratégies et roadmaps. Dans le cadre de la mise en oeuvre de ces plans, ils feront appels à divers spécialistes, de l'expert en en sécurité informatique au certificateur ISO 27001 en passant par divers analystes. Ces professionnels, experts de leurs domaines, agissent alors bien dans un contexte d'intelligence économique, mais pour autant, leurs métiers ne sont pas devenus des métiers de l'IE.
Journalisme d'investigation, DPO (RGPD), anti-blanchiment, audit juridique... sont aussi des métiers qui peuvent servir des projets d'IE. Mais chacun pour ses raisons, aucun d'entre-eux ne devrait se revendiquer de l'intelligence économique. L'IE est une chose, le journalisme en est une autre. Le DPO/RGPD est une réponse à une loi, pas un moyen de créer un avantage concurrentiel. Comme les mesures anti-blanchiment. Même si certains de leurs outils/pratiques sont appelés à la rescousse dans le cadre d'un projet d'IE.
En conclusion, même si je suis convaincu que ces réflexions existent dans le chef de ceux qui nous proposent cette cartographie, je pense que le choix de nous communiquer uniquement des mots-clés est dommageable. Ils permettent à chacun trop de liberté dans l'interprétation des concepets proposés. En l'espèce, je retitrerais cette cartographie en "Outils, pratiques et métiers qui contribuent aux activités d'intelligence économique".