Dans le monde de l'intelligence économique (et stratégique) que je fréquente, on fait régulièrement référence aux informations et littératures noires, grises et blanches. Traditionnellement, on considère que
- l'information (littérature) noire est confidentielle, secrète et uniquement accessible aux personnes autorisées
- l'information (littérature) blanche est du domaine public, largement diffusée et facile à obtenir
- l'information (littérature grise) est dans le no man's land séparant les zones noires et blanches et est donc composée des informations auxquelles il est permis d'accéder, mais dont l'accès est difficile en raison de la rareté des points d'entrée ou des supports
- 80% de l'information disponible est blanche, 5% noire et le reste grise
La lecture de l'article "Vers une nouvelle définition de la littérature grise", rédigé par Joachim Schöpfel et publié dans le dernier n° des Cahiers de la Documentation (2012/3 -
http://tinyurl.com/buz8kue) m'a ouvert une porte vers un espace que je ne soupçonnais pas: les discussions d'experts autour de la définition et du concept de littérature grise! La définition la plus largement acceptée est celle dite de Luxembourg et qui date de 1997: "
[La littérature grise est] ce qui est produit par toutes les instances du gouvernement, de l'enseignement et la recherche publique, du commerce et de l'industrie, sous un format papier ou numérique, et qui n'est pas contrôlé par l'édition commerciale". Soit, même si, intuitivement, j'ai l'impression que cette définition ne couvre pas toute ma réalité de littérature grise.
Finalement, le plus surprenant pour moi qui essaie de capter le côté pragmatique des choses (en l'occurrence la difficulté d'accès, au-delà, peu importe, une information est une information, un document est un document) est l'impression d'une volonté de classer pour classer dont je ne perçois pas l'utilité ou l'intérêt. Et je suis d'autant plus mal à l'aise que je découvre des structures organisées qui consacrent de l'énergie et du temps au concept de littérature grise (par exemple le réseau Greynet -
http://www;greynet.org). C'est que cela doit avoir de l'importance. Et je ne sais que faire de cette réflexion qui voudrait étiqueter "grise" une littérature qui fait l'objet d'un intérêt et d'un effort de collecte de la part des bibliothèques.
Pourtant, l'auteur note bien que "
les internautes [clients de la littérature grise] ne sont pas conscients des catégories particulières des produits et canaux de diffusion. Leur problème est l'accès, pas la production, la distribution ou la collecte. Les documents non-publiés ou semi-publiés ne signifient rien pour eux. Gris ou blanc leur importe peu."
Je vais donc mettre en place une veille pour rester au courant de l'évolution de ce débat...
Pour ceux qui souhaitent en savoir plus sur ce débat, l'article "Towards a Prague Definition of Grey Literature" du même auteur est sans doute intéressant (
http://tinyurl.com/cz2plxl)