Cet article rédigé par Mylène Hardy en 2010, mais mis à disposition dans les archives publiques du CNRS il y a un an (
http://tinyurl.com/bs9ojc6) nous offre un regard intéressant sur l'histoire de l'émergence du concept d'intelligence économique en France, et sur la manière et les raisons pour lesquelles ses spécificités par rapport aux pratiques étrangères (principalement anglo-saxones) se sont construites. Rien que ce regard mérite que l'on accorde de l'intérêt à ce document, tant il nous donne des clés pour comprendre la situation actuelle.
Elle présente effectivement l'intelligence économique comme souffrant de "flou conceptuel et linguistique rédhibitoire". Ce qui m'invite à vous proposer quelques citations extraites de ce document:
- Selon l'analyse de Moinet (2010), l'intelligence économique est le noeud de rencontre entre des hommes et des méthodes appartenant à trois modèles stratégiques que sont le modèle militaire, le modèle diplomatique et le modèle policier...
- L'auteur nous invite à qu'en français, l'intelligence est avant tout la faculté de l‘esprit de relier divers éléments entre eux pour les appréhender.
- L'auteur relève qu'une particularité du modèle français au niveau épistémologique est d'associer très vite l'intelligence économique avec le paradigme de la complexité.
- L‘auteur relève aussi l‘influence de Philippe Baumard qui défend en effet le concept d'une intelligence fondée, non pas sur l'accumulation de données, mais comme la rencontre des différents points de vue dans le but de créer de la connaissance. "In the knowledge warfare paradigm, strategic advantage does not lie in the concentration of facts-and-figures, but in the complementarity and singularity of the brains who interpret them" (Baumard, 1996, p.9).
- Elle rappelle l'approche américaine de l‘information qui est majoritairement basée sur la théorie mathématique de l'information, qui a pour prémisse que l'information peut être transportée et délivrée comme un objet. En tant que telle, elle est cumulable, et permet donc de "réduire l'incertitude". Baumard souligne les problèmes d‘une telle approche: "Knowledge is assumed to be merely a long-term representation; is seen as a commodity; is talked in terms of volume and stocks; is described with a vocabulary borrowed to hardware management. In such a biased conception of knowledge, one usually distinguishes short-term, or procedural, representations that can be immediately acted on one side, and long-term, or structural, representations, whose access and development need several apprenticeships.
Enfin, parce que cela peut être utile pour certains des lecteurs de ce billet, rappellons la proposition de défintion l‘intelligence économique à travers 10 points, faite par le feu HRIE:
- définir les besoins en information;
- collecter l‘information ouverte;
- ne pas négliger l‘information «informelle»;
- hiérarchiser et traiter l‘information recueillie;
- diffuser l‘information à point nommé;
- mesurer la satisfaction des destinataires;
- protéger les données sensibles et le savoir-faire;
- influer sur l‘environnement;
- bannir définitivement la naïveté tout en évitant de verser dans la paranoïa;
- obtenir l‘adhésion de tous.