Nous venons de vivre 3 mois de confinement et de lockdown, 3 mois d'une situation quelque peu surréaliste à laquelle personne ne s'était préparé. A cette occasion, on a pu lire ça et là que les entreprises seraient bien inspirées d'en profiter pour initier une démarche d'intelligence économique/stratégique afin de de se positionner en vue de la reprise. Bien sûr, l'idée est loin d'être saugrenue. Pourtant, parmi les entreprises que je côtoie de près ou de loin, principalement des petites et micros entreprises, il semble que cela n'a pas encore été le cas.
Il faut bien constater que les premiers jours, dernière décade de mars ont été ceux de la sidération. Rapidement, dans la foulée de la surprise, c'est une certaine intelligence opérationnelle qui a pris le pouvoir. L'attention était focalisée sur le diagnostic et les mesures à prendre pour limiter les conséquences. Puis, dans l'ambiance "football panic" qui régnait alors, certains se sont lancés dans quelques innovations, soit par altruisme, soit par sentiment d'urgence... De ces derniers, nombreux sont ceux qui ont découvert, par la pratique, qu'un modèle d'affaires est un savant équilibre et qu'aucun pivot n'est instantané et que toute modification du modèle est une sorte de battement d'aile de papillon à New-York.
Je pense que ces 3 mois, qui sont heureusement derrière nous maintenant, n'étaient pas propices aux activités d'intelligence stratégique, voire même d'intelligence économique. Nous venons de vivre une situation de crise aiguë et majeure et nos pratiques (IE et IS) ne sont pas destinées à la gestion de crise. L'intelligence stratégique projette son regard sur le long terme, l'intelligence économique sur le moyen terme et la survie sur le très court terme. En mode "sauve qui peut", l'attention est naturellement consacrée à la survie. Et il n'y a guère de signaux faibles à traquer...
Les premiers pas de sortie de crise ne mèneront ostensiblement pas tout de suite vers le monde de demain auquel tant de gens aspirent. Ils seront surtout consacrés à panser les plaies et reconstruire les outils. Ou, pour certains, à une réflexion profonde sur le sens, la vision et la mission et donc sur le modèle d'affaires. Mais cette posture sera difficile à prendre et lourde de conséquences. Et il faudra avoir les reins encore assez solides.
Les stigmates de la crise vont sans doute perdurer longtemps, tant du côté de l'offre que de celui de la demande. Les cartes ont été rebattues et redistribuées. Dans cette nouvelle donne, les marchés vont présenter de nouveaux visages, de nouvelles dynamiques. Sans doute pas totalement différents, mais suffisamment pour invalider les habitudes et comportements "d'avant" et pour imposer de nouveaux cheminements d'apprentissages. Chaque entreprise gagnerait donc à mener une réflexion sur les cartes qu'elles ont maintenant en main, la manière de les jouer et les positions qu'elle souhaite occuper dans un futur plus ou moins proche. Et dans cette dynamique, sans surprise, il y aura une prime aux plus rapides et aux mieux informés.
En conclusion, les entreprises les plus ambitieuses déploieront sans nul doute des activités d'intelligence stratégique, pour définir de nouveaux objectifs et les moyens d'y arriver. Les entreprises les plus faibles continueront à se battre pour leur survie. Pour celles de l'entre-deux, il faudrait surveiller son environnement pour éviter, au minimum, d'intégrer le groupe des plus faibles ce qui, somme toute, est du domaine de l'IE et de l'IS. Et dans cette perspective, on ne peut que recommander aux entreprises de se faire accompagner par quelques professionnels qui leur permettront d'aller plus vite, plus haut, plus loin, tout en consommant moins de ressources.