Après un premier survol du modèle d'affaires d'Uber, qui a mis en évidence les intervenants quatre grandes catégories d'intervenants clés (Uber, les clients-utilisateurs, les chauffeurs, les investisseurs), il me semblait intéressant de commencer par étudier les relations entre Uber et ses chauffeurs. il est vrai que ces derniers sont des éléments clés du modèle d'affaires.
Leur position sur le BMC n'est pas intuitive. Parce que Uber doit les chasser, pour les faire entrer à son service, une tendance naturelle est de les considérer comme des clients. Mais Uber ne leur facture rien, ou pas grand chose, que du contraire. C'est surtout les chauffeurs qui facturent à Uber. Ils devraient donc relever de la case "partenaires clés". Mais sont-ils partenaires ou fournisseurs? A voir comment Uber les traite, le déséquilibre de la relation et les conditions drastiques (les obligations à respecter, notamment celle de répondre aux injonctions de Uber, les motivations de rupture de contrats, la gestion du prix des courses...) ils doivent être considérés comme des fournisseurs. Clés lorsqu'ils sont envisagés en groupes, insignifiants à titre individuel.
Lorsqu'on réfléchit au modèle d'affaires à destination des chauffeurs ce qui frappe sur le BMC, c'est la prédominance des cases "proposition de valeur" et "relations clients". Les propositions de valeur surfent sur les besoins primaires que sont la liberté (flexibilité) et la survie (rentrée d'argent). Les relations clients, de leur côté, sont plutôt bien verrouillées, limite léonines. Cela transparaît à la fois de l'avis des chauffeurs qui s'expriment, mais aussi des statistiques (turn-over et durée moyenne de travail pour Uber). In fine, les chauffeurs sont plutôt considérés comme une force de production pas chère (à l'origine de l'avantage concurrentiel du prix) et taillable et corvéable à merci.
Dans la foulée, il m'a semblé intéressant de consacrer de l'attention au modèle d'affaires miroir, celui des chauffeurs vis à vie de Uber (Uber devient le client). L'intérêt étant d'identifier les raisons et les conditions qui scellent la relation du côté de la force de travail. Sans surprise, ils diffèrent considérablement. Et le déséquilibre entre les coûts et les revenus (en faveur de ces derniers) ne peut-être atteint que grâce à des revenus non monétaires (flexibilité, liberté). Pour de nombreux candidats chauffeurs, qui ne restent pas longtemps au service d'Uber, ce déséquilibre est resté promesse.
Ici, tout se joue, me semble-t-il, au niveau de la relation client. Les chauffeurs acceptent le déséquilibre de la relation tant que l'espoir est là. Et pou ceux qui se sont engagés dans une relation "temps plein" s'il y a peu de barrières à l'entrée, les barrières à la sortie sont plus difficiles à faire tomber (trouver un autre emploi à occuper qui rémunère mieux que Uber...)
Conclusion à ce stade, les chauffeurs sont un facteur de production peu considéré, un mal nécessaire. Ce qui est en ligne avec l'intérêt de Uber pour les services et solutions qui mettent les chauffeurs de côté (location de vélos et de trottinettes, développement de voitures et de camions sans chauffeur...)
Sources: